Le tatouage en remède post-opératoire après un cancer du sein

Ce vendredi, Chantal Fajardo, une Lot-et-Garonnaise de 48 ans, est venue se faire tatouer sur la poitrine à Bordeaux, à la suite d’un cancer et d’une ablation du sein en 2010.

« En 2013, j’avais vu un tatouage sur une poitrine reconstruite dans le magazine Rose, et tout de suite je me suis dit : « C’est cela qu’il me faut ». Mais je ne voulais pas le faire dans n’importe quel salon, et pas avec n’importe qui » explique-t-elle.

Dans les appartements cosy de la Maison Rose, un lieu d’accueil pour les femmes concernées par un cancer, place des Quinconces, Chantal est prise en charge et entourée. Elle a échangé pendant trois mois avec sa tatoueuse, Juliette, qui exerce habituellement à Langon (Gironde), avant de passer à l’acte. Et avant cela, il lui avait fallu obtenir un certificat médical de l’oncologue qui la suit.

Tout ce protocole, c’est l’association Sœurs d’encre qui l’a mis en place. Créée par la Bordelaise Nathalie Kaïd, elle est composée de médecins, de femmes et de tatoueuses.

« Pas évident de franchir les portes d’un salon » de tatouage

On ne se fait pas tatouer après une opération chirurgicale, qui plus est une ablation du sein, comme on se fait tatouer par esthétisme. Nathalie Kaïd a pu le constater depuis trois ans qu’elle prépare un livre de photos, recueillant les témoignages de 195 femmes qui se sont faites tatouer suite à une maladie ou un accident.

Suite à ces rencontres, elle a lancé l’année dernière, en partenariat avec la Maison Rose, la première édition de Rose Tatoo qui, pendant la manifestation Octobre Rose, propose gracieusement des tatouages aux femmes après un cancer du sein. Rose Tatoo a été reconduit cette année et s’achève cette semaine. Seize femmes y ont participé.

« Après leur opération, beaucoup de ces femmes continuent de souffrir, explique Nathalie Kaïd. Certaines ne veulent même plus se regarder dans un miroir, c’est difficile pour elles, et difficile dans leur couple. Le tatouage peut s’avérer salvateur, certaines m’ont dit qu’il les avait amenées au bout de leur guérison, mais ce n’est pas pour autant évident de franchir les portes d’un salon. D’où l’idée de l’opération Rose Tatoo. »

Treize tatoueurs spécialement formés

La Bordelaise ne voulait toutefois pas en rester là, et a donc lancé en parallèle une association, Sœurs d’encre, qui agit tout au long de l’année. « Sur notre site, on explique notamment que le tatouage ne va pas à toutes les femmes, et qu’il faut une année minimum, voire deux, de recul avant de se faire tatouer. »

Le but de l’association est également de former les tatoueuses, pour qu’elles connaissent les cicatrices et les tissus qui ont été touchés lors de l’opération. Treize ont été formées à ce jour. Juliette confirme que la démarche de tatouer une femme suite à une maladie est très singulière « On se retrouve face à des femmes qui ne se sentent plus femme, il y a beaucoup de psychologie, d’accompagnement, d’écoute. » « Nous avons affaire de plus à des femmes qui ne connaissent pas forcément l’univers du tatouage ni la sensation des aiguilles » ajoute sa collègue Céline.

Un livre de photos pour la fin de l’année

L’association touche en tout cas de plus en plus de femmes, qui arrivent parfois de loin pour se faire tatouer. « Beaucoup d’entre elles regrettent qu’il n’existe pas la même structure à Paris, Lille ou Nantes, explique Nathalie Kaïd. Car avant touche chose, on écoute leur histoire, c’est beaucoup de discussions. Ce sera l’une de nos priorités pour 2018, étudier la possibilité d’ouvrir des antennes. »

En attendant, le livre photos de Nathalie Kaïd, S’aimer tatouée, sortira pour la fin de l’année. Le public peut contribuer à son édition sur kisskissbankbank.

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